28 Mai 2012
Je vais te dire, ce qui me fout le plus les boules, ces jours-ci, ce n'est pas d'être seul, ce n'est pas de me retrouver x années en arrière, mais avec x années de plus quand même, fauché, seul, n'arrivant pas tous les jours à remplir mes journées, sauf à me lobotomiser devant des jeux vidéo sur FB. Ce qui me met en rogne, ce n'est pas les doutes qui sont revenus, les peurs de rester seul, de finir seul, de crever seul, cette gambergite qui surgit nécessairement de temps en temps et qui te pourrit une belle journée. Non, ce n'est même pas ça. Pas plus que la rancoeur ou une quelconque idée de vengeance, ce n'est pas le genre de la maison.
Pas même - pas même ça ! - l'incroyable gigantisme de l'échec, le sentiment de s'être bien fait avoir, le gouffre qu'ouvre le fait de s'être fait jeté comme si de rien n'était, sans motif, sans même une phrase claire, qui prouverait qu'il y a au moins une décision murie, étayée, assumée. Même pas. Moi, je n'ai eu droit qu'à une phrase alambiquée sur un texto. Et encore, parce que j'ai insisté pour savoir, au bout de x mois à me faire trimballer... La classe quand même ! Ce n'est même pas ça qui me donne la nausée. Pas non plus le fait que ça fait deux fois à six ans d'intervalle, surtout que cette fois, j'avais mis le paquet pour que ça marche : prise de risque maximale, professionnelle, et financière aussi ! Trois ans à donner en échange... en échange de quoi d'ailleurs ? De ça. Un texto pour confirmer que la vie, c'est devenu plus sympa sans toi qu'avec et que donc, ça continue sans toi.
Non, la vraie vérité, ce qui me fait vraiment chier, c'est que, pendant que je gamberge avec ma fracture, mes peurs, ma solitude dévorante, elle, l'impression qu'elle donne, c'est que tout va bien. Elle papillonne. Elle sort avec ses supers copines, elle va à Paris, après Rome, elle va voir des tournois de tennis, cool la vie ! Moi, je n'ai même pas les moyens d'un billet de train pour Paname en ce moment... Elle se porte bien, elle a même écrit sur FB il y a peu (36 heures après les obsèques de Papa, bonjour la délicatesse) qu'elle venait de vivre (op. cit.) "six mois de pur bonheur" ! Tu m'étonnes, c'est là qu'elle m'a largué, sans motif, juste comme ça, par convenance personnelle, c'est trop de la balle comme semestre ! Et peu importe le deal initial. Et peu importe les promesses de mariage trois fois réitérées, et encore l'été dernier ! Et pourquoi qu'elle se sentirait tenue par de tels engagements ?! C'est la génération "y" maintenant, des histoires à 3 branches : ma vie, mon cul, ma gueule ! Et les autres, ben, si ça le fait, si ça aide, si c'est (op. cit. encore) "compatible", alors tant mieux. Et seulement tant que ça le fait, que ça aide, que c'est "compatible". Pas de raison de dévier d'un iota de sa trajectoire, d'accepter le moindre compromis, pas question de déroger à sa feuille de route personnelle ! Et puis quoi, j'étais pas obligée de quitter Agen et mon entreprise pour venir à Paris pendant 2 ans, personne ne m'a contraint à payer 50% plus cher un appart deux fois plus petit que celui que j'avais avant, mal isolé et pas insonorisé ! Personne ne m'a obligé à assumer des déplacements réguliers entre Paris et le Sud-ouest pour le boulot, en TGV, le train le moins cher de France c'est bien connu ! Personne ne m'a obligé à travailler pendant 2 ans sur une petite table sise au bout du lit, avec un mal de dos de merde qui cisaillait tous les matins. Personne, non personne c'est vrai. Non, je l'ai fait parce que, justement, sans tout ça, notre histoire ne pouvait pas exister. Je l'ai fait parce que, au bout de ces années d'efforts, il y avait une promesse, celle d'un avenir radieux, d'un avenir à deux. Et tant qu'on y est, ne soyons pas faux-cul, y'a bien quelqu'une qui a trouvé confortable, pratique, "compatible" de pouvoir préparer son ECN en étant à Paris intra-muros et non de l'autre côté, dépendante des trains à Saint-Lazare ou des trams Porte de Versailles. Bien contente d'être nourrie, logée, blanchie, soutenue aussi pendant tout ce temps... Et là, elle m'a juste zappé. Sans raison objective, sinon qu'elle préfère continuer sans moi. Et ça a l'air normal. Ce qui me fracasse le plus en fait, c'est qu'elle ait l'air de trouver ça normal, comme une issue finalement assez commune et sans gravité. Alors que c'est pour le moins moralement contestable et humainement dégueulasse ! Et je ne suis pas sûr qu'il se sera trouvé quelqu'un pour le lui faire remarquer... Enfin si, j'espère. Pour qu'au moins elle apprenne quelque chose. Et qu'elle n'en foute en l'air pas trop d'autres.
Voilà ce qui me fait chier ces jours-ci. Le reste, les vrais problèmes, les vraies questions, les vraies affres, ils viendront. Après. Pour l'heure, j'ai ça dedans, c'est enduit d'amertume, emballé dans un sentiment d'injustice et ficelé dans un ruban qui déteint sur les mains, le souvenir de la violence ressentie tous ces derniers mois depuis janvier. J'espère que, maintenant que c'est dehors, ce ne sera plus dedans, et que je pourrai passer à autre chose. Enfin essayer...
Juste un mot encore : d'aucun trouveront peut-être ce papier trash et la première intéressée en sera peut-être même blessée. Tant pis, c'est comme ça, je ne vais
pas me mettre à tricher sur ce blog sous prétexte qu'elle est susceptible de le lire, elle ou des membres de sa famille.
Maintenant, pour finir, aussi pour ne pas rester sur la colère, je saisis la parole du poète : "Chaque homme est seul et tous se fichent de tous et nos douleurs sont une île déserte" (Albert Cohen). La mienne est l'endroit le plus peuplé de ma vie...