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Le continent

(le monde de Tonton Raoul)

"A thing of beauty is a joy for ever"

D'abord, avant toute chose, saches-le, note-le bien, cet article est dédié à Cintia Dicker, la jolie top-modèle rousse qui joue à la balançoire sur la photo ci-dessous. Oui, parce que c'est un peu grâce à elle que j'écris cet article. En fait, tout commence quand je lis Glamour, que je reçois à la maison chaque mois puisque je m'y suis abonné sous un pseudonyme féminin (qui se trouve être l'exact nom de ma blonde) (qui croit vraiment que c'est elle qui est abonnée... eheheheh !). Et voilà que l'autre mois, je vois un dossier sur les envies de l'été, je te les résume vite fait : des boucles d'oreilles, des maillots de bain, des colliers, et toutes ces choses essentielles sans lesquelles l'été des femmes va forcément être gâché. A chaque page, une photo de cette très belle fille (dont j'ai lu depuis sur Wiki qu'elle est brésilienne) portant les accessoires promus (et parfois ne portant presque rien d'autre que le collier ou le monokini top tendance). Intéressé par ce sujet de fond, je regarde les photos et, comme je suis un grand passionné, je lis aussi les légendes des photos. Là, tu apprends tout, mais alors tout : qui a dessiné le collier (ou le monokini), où tu peux te le procurer (toi aussi, il faut que tu réussisses ton été !) et combien. Tu apprends aussi le nom de la maquilleuse, de la coiffeuse, de la photographe et même de la stagiaire qui a été cherché le café. Mais rien sur la fille ! Rien sur le modèle qui nous dévoile quand même son joli petit corps ! Anonyme ! Ainsi commence mon papier sur la presse féminine : l'endroit où l'on maltraite le plus les femmes, le stade le plus abouti avant les talibans (mais dans l'autre extrême) de la réifaction de la femme. 

dicker.jpg

Au final, le nom de Cintia Dicker était marqué dans la page de sommaire, en police de taille 2 ou 3. Ah ouf ! Quand même !

La presse féminine, puisque tel est mon sujet, est un monde que les hommes ne peuvent pas comprendre. Je me demande même dans quelle mesure il n'est pas préférable qu'ils s'en tiennent à l'écart, conseil que je suis le premier à ne pas tenir. Au programme à la maison donc, Glamour tous les mois, mais aussi par moment Grazia ou encore Marie-Claire. Il existe des milliers de titres, mais je ne vais parler que de ceux que j'ai déjà ouverts. Par exemple, il existe aussi Marie-France, pour les quinquas et les sexagénaires. Je suppose que bientôt, on inventera un Marie-Yvonne pour les nonagénaires désireuses de rester dans le coup.

D'abord, saches-le, un tel journal commence par plusieurs pages de pub, sur lesquelles des filles dont on voit ou devine les seins te vendent un parfum. J'ignore pourquoi il faut montrer des femmes dévêtues pour convaincre d'autres femmes d'acheter un produit, mais bon... En général, ce ne sont pas des thons, donc, je dis rien... Ensuite, tu as la page de sommaire, un rien compliqué à lire tant y'en a dans tous les sens. Grosso modo, tu trouves dans ces canards des pages "people" (pour savoir comment s'habillent les stars), un ou deux reportages de fond (d'une page maxi, faut pas déconner non plus), puis des pages "sexo" pour savoir si tu as envie de tromper ton copain pendant l'été (desfois que, toute seule, tu ne saches pas si tu es heureuse ou pas avec lui), puis des pages "mode" (environ 725 sur les 90 que compte ton journal préféré) et encore quelques rubriques sociétales. L'inévitable quizz. Le tout agrémenté de photos de soi-disantes femmes célèbres, des stars que seules les personnes qui lisent ton journal connaissent, des "jet-setteuses" toutes plus mal fagotées les unes que les autres, dont on te décrit en légende la tenue et la parure, avec nom des créateurs, adresse pour acheter, etc.

Parce que, tu l'auras compris, la presse féminine n'a pas pour objet d'informer les femmes. Non, elle n'est là que pour les pousser à consommer. La presse féminime ne recule devant aucune démagogie pour vendre et faire vendre. C'est le stade  ultime de la société de consommation de masse, frivole, superficielle et sans identité : toutes comme dans Glamour, c'est la seule voie possible pour conserver une existence sociale !

Tout est bien étudié : le format du journal (petit pour tenir dans le sac et pouvoir être ouvert dans le RER), la couverture aguicheuse (très originale toujours : une fille en gros plan) avec un titre prometteur (qui annonce un article de maximum 2 pages), et un ton sans appel : les femmes qui écrivent ces journaux savent tout ce qu'il faut à leurs lectrices (puisque ce sont des femmes comme elles) et donc, il n'y a pas à réfléchir, mais à faire comme elles te disent ! Et voilà la mécanique infernale est enclenchée...

Donc, la recette est : des belles filles + des produits à acheter + plus l'absence de débat et de prise de recul. A croire que c'est Berlusconi qui a inventé la presse féminine !

Aller, je modère mon propos sur Glamour : dans ce journal, il y a un éditorial de la rédac' chef, ce qui n'est pas le cas par exemple dans Marie-Claire. L'édito se veut sympa et complice : la rédac' chef est ta copine, les journalistes et les chroniqueuses sont tes copines, entre ici Jeanne Moulin, en toute confiance, abandonne-toi à notre bienveillante expérience de femmes branchées. Bien sûr, les lectrices ne lisent jamais l'édito, c'est la seule page où rien n'est à acheter. Et voilà enfin, au terme de ce papier, une touche positive : je sais maintenant pourquoi il faut des hommes comme moi, qui lisent Glamour : pour que l'édito ne soit pas écrit en vain !

Et ben, j'me sens mieux maintenant !

Bonne semaine !

 

PS : la France qui gagne aujourd'hui, ce sont les handballeurs, champions du monde pour la quatrième fois et qui poursuivent leur incroyable domination absolue sur la planète. Bravo les gars ! En passant, j'ai découvert que ce sport offre un chouette spectacle, alors à quand Raoul dans un "Arena" pour voir un bon vieux Montpellier-Kiel en champions league ?

PS2 : J'ai dit beaucoup de mal de la presse féminine. Pourtant, force est de reconnaître que la presse masculine (pour ce que j'en sais) n'est pas plus reluisante et joue sur les plus bas instincts pour atteindre les même objectifs que sa collègue féminine : imposer une pensée unique mercantile, insipide et débilitante. A croire que, à Knysna, FHM était distribué gratuitement...

PS3 : le titre de cet article est une citation de John Keats, le fameux poète anglais du début du XIX° siècle. Pour les gens bilingues Français comme moi, je traduis : "Un objet de beauté est joie pour l'Eternité". C'est tiré d'un recueil intitulé "Endymion".

 

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